Déchiffrer la Sécu

Rédigé le 14/11/2025

La protection sociale collective

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La protection sociale collective

108,6 milliards de prestations familiales

Versées par la CAF à près de 32 millions de personnes, les prestations familiales couvrent près d'un Français sur deux. La branche Famille est ainsi au cœur de la Sécurité sociale.

Elle ne se limite pas aux allocations : elle finance aussi les crèches, centres sociaux, aides au logement et actions de soutien à la parentalité, facilitant la conciliation entre vie professionnelle et personnelle.

Pourtant, depuis plus de trente ans, cette branche est fragilisée : baisse de ses recettes (-15,4% entre 2014 et 2022), remplacement progressif de la cotisation par l'impôt, remise en cause du principe d'universalité (les allocations étant désormais soumises aux revenus) et sous-investissement dans les modes de garde.

L'effet de ces politiques : c'est un taux de natalité en berne avec 1,62 enfant par femme en 2024, soit le chiffre le plus bas depuis la Seconde Guerre mondiale.

Pour FO, la branche Famille n'est pas une charge mais un investissement d'avenir! C'est pour cette raison que FO revendique le retour d'un financement de la branche par la cotisation et la fin des diminutions de ses recettes, le retour du principe d'universalité des prestations, l'augmentation des minima sociaux et des allocations familiales ainsi qu'une véritable politique ambitieuse en matière de petite enfance.

100 euros de cotisation : à quoi ça sert?

En France, les salariés, les entreprises, les particuliers employeurs et les travailleurs indépendants cotisent auprès de l'Urssaf pour financer le modèle social.

En 2024, l'Urssaf a recouvré 588,5 milliards dont 303 milliards de cotisations nettes auprès de 12,2 millions d'usagers. Elle se charge ensuite de redistribuer ces cotisations à plus de 880 organismes pour financer notamment les prestations sociales auprès des assurés sociaux.

Pour 100 euros de cotisation :


38 euros vont à la maladie
29 euros vont à la retraite
9 euros vont à la famille
7 euros vont à l'Assurance chômage

7 euros vont à l'autonomie
3 euros au remboursement de la dette sociale
2 euros aux accidents du travail et maladies professionnelles

2 euros à la formation professionnelle
2 euros aux transports publics
1 euro aux aides au logement, invalidité, décès, emploi des travailleurs handicapés.

La cotisation incarne un modèle de solidarité intergénérationnelle, se distinguant de la charité publique ainsi que des modèles d'assistance financés par l'impôt.

Pour FO, il s'agit du salaire différé relevant de la mise en œuvre d'une devise De chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins.

48% de cotisations financent notre modèle de protection sociale

Les dépenses de la Sécurité sociale pour 2024 s'élèvent à 643 milliards d'euros, tandis que ses recettes atteignent 627 milliards d'euros, soit un déficit de 15 milliards d'euros.

Alors qu'elles représentaient plus de 90% du financement de notre modèle de protection sociale en 1990, la part des cotisations n'a cessé de diminuer au fil des années pour ne représenter aujourd'hui que 48%.

Les exonérations de cotisations, mais surtout leur substitution progressive par l'impôt (CSG, CRDS, taxe sur le tabac, TVA), sont les principales causes de ce basculement.

Cet affaiblissement de la cotisation n'est pas anodin : il fait craindre une étatisation de notre système de protection sociale, le faisant dériver d'un modèle de solidarité vers une logique de charité publique. Il rend également les budgets de l'État et de la Sécurité sociale interdépendants. Ainsi, en cas de crise majeure (épidémie, guerre…), quel choix l'État opérera-t-il dans l'affectation des ressources si son propre solde budgétaire, déjà très dégradé, venait à se détériorer davantage?

Cette évolution remet en cause les droits ouverts par les cotisations, ainsi que le droit de regard et de gestion confié aux représentants des travailleurs.

2 administrateurs FO dans le Conseil d'administration des caisses

Les ordonnances de 1945 prévoyaient une gestion des caisses par des conseils d'administration désignés. En octobre 1946, ces conseils deviennent élus à la proportionnelle, avec 75% de représentants des salariés et 25% des employeurs.

En 1967, les ordonnances Jeanneney instaurent le paritarisme (gestion conjointe à parts égales entre salariés et employeurs) dans les caisses, parallèlement à la création des régimes complémentaires et de l'Assurance chômage. FO s'en félicite alors, y voyant un rempart contre la politisation du système.

Mais cette autonomie s'est progressivement effritée. L'État a renforcé son contrôle, notamment via les ordonnances Juppé de 1996, instaurant des tutelles financières, de gestion et de légalité.

La réforme de 2004 marque un tournant : les conseils perdent leur pouvoir de décision au profit des directeurs, et le paritarisme est dilué dans une gouvernance centralisée, intégrant d'autres acteurs (mutuelles, associations) au nom d'une représentativité élargie, mais au détriment des représentants des travailleurs.

Aujourd'hui, deux administrateurs FO siègent dans chaque caisse, locale comme nationale. Ils y défendent, au nom des travailleurs, les fondements de notre modèle social.

2 à 3,6 milliards d'euros de sous-déclarations des accidents du travail et maladies professionnelles

La sous-déclaration consiste à ne pas déclarer un accident du travail ou une maladie professionnelle à la Sécurité sociale. Ce phénomène résulte souvent de pressions patronales ou d'une méconnaissance des droits par les salariés.

Les conséquences sont lourdes : les salariés perdent des droits, les employeurs sont déresponsabilisés et la branche Maladie supporte à tort des dépenses qui relèvent de la branche AT-MP (qui, pour rappel, n'est financée que par la cotisation patronale, à la différence de la branche Maladie qui est financée par la cotisation patronale et salariale).

Lutter contre la sous-déclaration, c'est garantir une juste indemnisation, préserver l'équilibre des comptes sociaux et favoriser une meilleure prévention en responsabilisant les employeurs. Cela passe par une meilleure information des salariés, la formation des acteurs de terrain, des contrôles renforcés et, le cas échéant, des sanctions envers les employeurs défaillants.

5e branche - La branche autonomie

Instaurée en 2020, dans un contexte d'accélération inédite de vieillissement de la population (choc démographique attendu dès 2030), la branche Autonomie est la dernière-née des branches de la Sécurité sociale.

Son périmètre concerne à la fois les personnes âgées en perte d'autonomie, dont le nombre va fortement augmenter dans les années à venir (4 millions en 2050 contre 2,5 millions en 2015), et les personnes en situation de handicap.

Sa gouvernance est assurée par la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), mais les interlocuteurs sociaux n'ont qu'une place très limitée au sein de son conseil (forte présence de l'État et des associations).

Alors que les enjeux en matière de perte d'autonomie sont considérables, les ressources financières de la branche Autonomie (provenant majoritairement de la CSG) sont très insuffisantes, en dépit de la fraction supplémentaire de CSG qui lui est allouée depuis 2024 (+ 0,15 point). L'objectif de dépenses de la branche Autonomie pour 2025 est de 42,3 milliard d'euros, soit une hausse de 6% par rapport au PLFSS pour 2024, mais le solde de la branche pour 2025 sera d'ores et déjà déficitaire en 2025 (- 0,4 milliards d'euros).

FO, qui n'était pas favorable à la création de cette cinquième branche atypique dans sa gouvernance (place minime accordée aux organisations syndicales), aurait préféré un rattachement de la perte d'autonomie à
la branche Maladie.

FO n'a de cesse de revendiquer un financement de la branche qui soit à la hauteur des enjeux, notamment du choc démographique.

80 ans - Naissance de la Sécurité Sociale

En 2025, la Sécurité sociale fête ses 80 ans. Une vieille dame… qui n'a pourtant jamais été aussi moderne.

Créée par les ordonnances des 4 et 19 octobre 1945, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, elle incarne depuis huit décennies une ambition forte : protéger chacun face aux aléas de la vie. Pilier de notre République sociale, elle est intimement liée à l'histoire de notre organisation. Ce sont, en effet, les futurs militants de la CGT-FO qui ont posé les fondations de la Sécurité sociale telle que nous la connaissons aujourd'hui.

Depuis 80 ans, la Sécurité sociale joue le rôle d'amortisseur de crises. Maladie, famille, retraite, accidents du travail, maladies professionnelles, perte d'autonomie : elle nous accompagne à chaque étape de la vie. Chacun y contribue selon ses moyens, chacun en bénéficie selon ses besoins.

Sans cesse attaquée par ses détracteurs qui souhaitent la rendre plus étatique et moins solidaire, la Sécurité sociale a tenu bon. C'est en grande partie grâce à l'engagement constant de FO, qui milite chaque jour pour sa défense. Cet engagement s'exerce à tous les niveaux : confédéral, régional et départemental, notamment grâce à nos militants FO qui siègent comme administrateurs et conseillers dans toutes les caisses de Sécu.

1 287 morts au travail

Chaque année en France, plus d'un millier de salariés meurent du simple fait d'exercer leur métier. En 2023, 759 salariés ont perdu la vie à la suite d'un accident du travail, 196 à cause d'une maladie professionnelle, et 332 dans un accident de trajet. Soit un triste record de 1 287 victimes officielles.

Derrière ces chiffres en constante augmentation depuis plusieurs années, ce sont des drames humains, des vies brisées et des familles endeuillées. S'ajoutent à cela des difficultés économiques et un véritable sentiment d'injustice dus à une indemnisation aujourd'hui inappropriée et insuffisante des ayants droit.

Pourtant, ces morts ne sont pas une fatalité : la plupart des accidents et maladies auraient pu être évités par une meilleure prévention, une vigilance accrue des employeurs, et un respect strict des règles de santé et de sécurité. Il est temps que la prévention des risques professionnels devienne une véritable priorité nationale, loin d'un simple enjeu statistique.

68,7 millions d'assurés pris en charge par l'assurance maladie

102 CPAM avec un budget de 261,8 milliards d'euros.

L'Assurance maladie, au-delà du remboursement des frais médicaux ou du versement des indemnités journalières, œuvre également pour la prévention et l'action sociale et sanitaire.

87% du territoire constitue un désert médical en raison d'un manque de professionnels de santé, ce qui pose un problème d'accès aux soins. Outre la désertification médicale, les raisons financières et géographiques peuvent pousser au renoncement aux soins.

L'accès aux soins, pourtant un enjeu de santé publique, constitue aujourd'hui un parcours parsemé d'embûches :

• des restes à charge (RAC) très élevés, certains assurés renoncent aux soins pour des raisons financières;
• l'insuffisance de médecins traitants : ce sont 6,7 millions de Français qui n'ont pas de médecin traitant;
• l'hôpital public est en crise avec un Ondam en dessous des besoins, soit 3,3% au lieu de 6%.

FO continue à revendiquer les moyens pour la branche Maladie car la santé ne peut pas être une variable d'ajustement, mais un bien précieux et sacré pour lequel il faut se battre.

80 milliards d'exonérations de cotisations patronales

En 2025, le coût total des exonérations de cotisations patronales en France est estimé à environ 80 milliards d'euros.

Ce montant, déjà record en 2023, n'a fait que s'accroître depuis plusieurs décennies. En effet, la multiplication des dispositifs depuis 1993, sans évaluation réelle de leur efficacité, a fait flamber le montant de ces exonérations.

FO souligne que de nombreuses études démontrent un impact nul ou très faible sur l'emploi. Dans la même veine, les économistes pointent l'effet pervers de ces exonérations : les trappes à bas salaires. En effet, les exonérations étant concentrées sur les bas salaires, les entreprises sont incitées à limiter les augmentations, conduisant ainsi à une Smicardisation des salariés.

Enfin, ces dispositifs fragilisent le financement de notre modèle social. à cause des mesures d'exonération, la cotisation représente aujourd'hui 48% du financement de notre Sécu, le reste provient de l'impôt.

FO milite pour un retour à un financement par la cotisation de notre sécurité sociale, seule ressource garantissant la pérennité de notre système social!

64 ans - L'âge légal de départ à la retraite

La réforme des retraites de 2023, entrée en vigueur le 1er septembre 2023, modifie l'âge légal de départ à la retraite et introduit plusieurs nouvelles mesures pour les travailleurs :

• l'âge légal de départ à la retraite passe de 62 à 64 ans. Pour ceux nés à partir du 1er septembre 1961, l'âge de départ augmentera de trois mois par génération, atteignant 64 ans pour ceux nés en 1968;
• la durée d'assurance requise pour bénéficier d'une retraite à taux plein augmente d'un trimestre par an à partir de la génération née en septembre 1961. Il faut donc avoir validé 172 trimestres, soit 43 annuités, pour bénéficier d'une retraite à taux plein;
• le montant de la retraite minimale (minimum contributif) a été revalorisé à 1200 euros brut par mois pour une carrière complète au Smic, soit 85% du Smic net. L'attribution de ce minimum contributif intégral reste toutefois conditionnée et n'est donc pas automatique;
• les départs anticipés sont possibles pour ceux ayant commencé à travailler jeunes ou ayant des carrières longues. Ceux ayant commencé à travailler avant 16, 18, 20 et 21 ans peuvent partir respectivement à 58, 60, 62 et 63 ans;
• un départ anticipé à 62 ans est également créé pour les personnes en inaptitude ou invalidité, l'accès à la retraite pour ceux qui ne peuvent plus travailler.

FO demande l'abrogation de cette réforme injuste, 62 ans c'est déjà trop!

13 milliards - Fraude sociale

La fraude sociale regroupe l'ensemble des actes visant à détourner ou éluder les règles de la protection sociale, que ce soit par des fraudes aux cotisations (telles que le travail dissimulé ou la sous- déclaration) ou aux prestations (allocations indues, fausses déclarations).

L'Urssaf caisse nationale estime la fraude à hauteur de 13 milliards par an. La majorité de cette somme est imputable aux entreprises (entre 7,3 et 9,2 milliards d'euros de fraude aux cotisations). Bien que souvent mis en cause dans le débat public, les assurés sociaux ne représentent en réalité qu'à peine un tiers de ces montants (entre 2,8 et 4,4 milliards d'euros). Le reste étant imputable aux professionnels de santé (1,3 milliard d'euros).

FO estime que la lutte contre cette fraude est un enjeu majeur puisqu'elle prive la Sécurité sociale de ressources essentielles, en fragilisant le système de solidarité et la couverture des droits sociaux pour tous.

Force Ouvrière dénonce l'ampleur de ces détournements et milite, d'une part, pour la mise en place d'une politique de prévention afin d'éviter les erreurs et, d'autre part, pour le renforcement des sanctions contre les entreprises, qui obtiennent la première place sur le podium des fraudeurs.

57 milliards - TVA sociale

La TVA sociale désigne un mode de financement de la Sécurité sociale qui consiste à affecter une part des recettes de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) au financement des dépenses sociales. Son coût s'élève à environ 57 milliards d'euros par an.

Elle est mobilisée par les pouvoirs publics pour compenser les déficits liés, en grande partie, aux exonérations de cotisations sociales.

Dès lors, augmenter cette TVA, comme il en a été question en 2025, conduit à accroître les inégalités et favorise la privatisation des risques sociaux (maladie, retraite…), car elle réduit la part de financement solidaire au profit d'un impôt supporté par tous, mais surtout par les plus modestes.

En effet, la TVA représente l'impôt le plus injuste puisqu'elle pèse proportionnellement beaucoup plus sur les ménages modestes que sur les plus aisés. Le taux d'effort de TVA est de 12,5% pour les 10% les plus pauvres, contre 5% pour les 10% les plus riches.

1% des retraités ont bénéficié du dispositif C2P

En 2021, 700 000 personnes avec des droits au régime général sont parties à la retraite.

Parmi elles, environs 21 000 avaient au moins un point sur leur C2P (Compte professionnel de prévention), mais seules 1 900 ont bénéficié d'une majoration de durée d'assurance à ce titre. Un peu moins de 1% sont donc parties plus tôt grâce au dispositif C2P.

D'ici quelques années, plus de personnes seront concernées puisque le dispositif, non rétroactif, a été mis en place en 2015.

FO revendique une meilleure reconnaissance et prise en compte de la pénibilité avec la réintroduction des quatre critères supprimés en 2017 :

• manutention manuelle des charges;
• postures pénibles;
• vibrations;
• agents chimiques dangereux.