Congrès de la fédération FO des métiers de la pharmacie, laboratoires de biologie médicale, cuir et habillement : Le développement syndical reste la priorité

Rédigé le 18/12/2025
par Clarisse Josselin, L'inFO militante

Quelque 120 délégués ont participé au 43è congrès de la fédération FO des métiers de la pharmacie, laboratoires de biologie médicale, cuir et habillement, qui s'est tenu les 29 et 30 novembre 2025 à Tours, sous la présidence du secrétaire général de la confédération, Frédéric Souillot. L'amélioration des salaires et des conditions de travail ainsi que le développement syndical figurent parmi les priorités des militants pour les quatre ans à venir.

Grégoire Hamelin, secrétaire général de l'union départementale FO d'Indre-et-Loire.

C'est en Touraine, territoire dans lequel l'industrie pharmaceutique est très implantée, comme l'a rappelé Grégoire Hamelin, secrétaire général de l'union départementale FO d'Indre-et-Loire, que s'est tenu le 43è congrès de la fédération FO des métiers de la pharmacie, laboratoires de biologie médicale et des secteurs du cuir et de l'habillement. Il a rassemblé près de 180 personnes, plusieurs secrétaires confédéraux et secrétaires généraux d'unions départementales et de fédération ayant pris place aux côtés des délégués pour suivre les discussions.

La secrétaire générale sortante Sylvia Veitl a été élue à l'unanimité du congrès pour un second mandat, et quatre nouveaux membres ont intégré le bureau, également élus à l'unanimité.

Les bons résultats obtenus par plusieurs branches de la fédération lors de la dernière mesure d'audience des organisations syndicales ont été à plusieurs reprises salués par les congressistes. FO a notamment renforcé sa première place aux élections TPE dans les pharmacies d'officine, avec un taux de représentativité de 33.49% (+ 4 points). Et comme nous n'avons pas d'heures de délégation, tout le travail militant est fait sur le temps des vacances et les dimanches, a souligné Pierrick Chaigne, secrétaire départemental FO des salariés de pharmacies de Vendée. C'est d'ailleurs pour cette raison que le congrès a de nouveau été organisé durant un week-end.

Ce score historique est le fruit d'une coopération étroite entre les UD, la fédération et la confédération. Il a aussi bénéficié du coup d'accélérateur donné à la communication par Cindy Ragot, une jeune militante en charge du développement des réseaux sociaux. Facebook, Instagram, LinkedIn… autant de pages dynamisées et harmonisées pour toucher différents publics et améliorer la visibilité de FO. Au 15 novembre on comptait 7 000 abonnés sur toutes nos plateformes et 1,5 million de vues en un an, tous réseaux confondus. La publication la plus vue a comptabilisé 135 000 vues, sur les nouvelles classifications en pharmacie, s'est félicitée la jeune militante.

Hausse des formations fédérales

De bon résultats ont également été enregistrés dans la répartition pharmaceutique avec un taux de représentativité de 31.22% (+ 3 points). On n'a jamais été aussi gros et présents dans la branche et dans certaines entreprises, a souligné Philippe Pannier, secrétaire de la branche, en invitant les jeunes militants à reprendre le flambeau. Dans la couture parisienne aussi FO voit son audience augmenter, à 14.85% (+4.4 points).

Sylvia Veitl, secrétaire générale sortante, réélue à l'unanimité pour un second mandat.

Dans sa résolution, le congrès appelle tous les militants à poursuivre leurs efforts et leurs investissements afin d'augmenter significativement la représentativité de FO dans les branches de la fédération, et de tendre vers l'objectif confédéral de 20% de représentativité.

Une attention toute particulière doit être portée au troisième collège, celui des ingénieurs, cadres et agents de maîtrise, notamment dans l'industrie pharmaceutique. A chaque cycle, nous constatons la croissance de cette catégorie de salariés et il est plus que temps d'en prendre conscience et de conquérir ce collège, au risque de disparaître syndicalement des entreprises, a alerté Sylvia Veitl.

Chez Novartis, Jean-Michel Marchal, délégué central FO et directeur d'excellence opérationnelle, a adapté son discours pour toucher les cadres. On est là pour décrypter au quotidien les discours de la direction, qui use d'une langue de bois incroyable. Elle parle de modernisation ou de réorganisation, alors qu'en fait elle va supprimer des postes. Le fond est clé mais la forme aussi est importante quand on a affaire à une population composée à 95% de cadres et ingénieurs. Il faut avoir un discours cohérent, dense, très précis et utiliser des supports PowerPoint de qualité, comme ceux des cabinets de consultants, a-t-il expliqué.

Le développement passera aussi par une augmentation des formations fédérales, notamment dédiées à la communication et à la syndicalisation. Depuis 2021, la fédération s'est engagée dans un programme de formation dense et ambitieux. Rien qu'en 2025, 25 sessions ont été organisées, soit 303 stagiaires et 439 journées stagiaire.

Laboratoires de biologie médicale : un dialogue social bloqué

Autre problématique abordée lors du congrès, les difficultés rencontrées dans plusieurs branches de la fédération en matière de dialogue social. De base, nous ne pratiquons pas la politique de la chaise vide, même si ça peut nous arriver de boycotter certaines réunions pour créer, si les conditions sont réunies, un électrochoc, a expliqué Sylvia Veitl. C'est arrivé en septembre 2024 dans la branche de l'officine, en raison d'un blocage persistant des salaires. Nous avons depuis lors pu signer un accord salaires et très récemment un accord sur les classifications dans cette branche, s'est félicitée la secrétaire générale. Cela n'empêche pas les délégués des officines de continuer à revendiquer une revalorisation significative de la valeur du point, en lien notamment avec l'élargissement des missions et des responsabilités des salariés (vaccinations, entretiens…)

D'autres accords ont pu être signés, notamment dans la maroquinerie, avec un avenant sur l'épargne salariale signé en septembre et un autre sur l'APLD-rebond mi-octobre.

Mais la situation est totalement bloquée dans les laboratoires de biologie médicale. En commission paritaire, on participe depuis deux ans à des réunions dites de négociation, mais les délégués patronaux arrivent sans aucune proposition sérieuse. La seule proposition qu'ils nous ont faite fut en novembre 2024, avec une hausse de 2,2% pour les sept premiers coefficients, afin de les ramener au-dessus du Smic pour être en conformité avec la loi, chose que bien évidemment nous avons refusée. C'est complètement ahurissant de se dire qu'on va finir dans les labos à tous être payés au Smic, a dénoncé Karine Le François.

Lors de la dernière réunion de négociation en novembre sur les NAO, le patronat s'est permis de venir avec un mandat à zéro, a renchéri Sylvia Veitl, qui va demander à rencontrer les présidents des quatre organisations patronales de la branche dès janvier. Car dans le même temps, les délégués constatent, au vu des dividendes versés aux actionnaires, la bonne santé économique du secteur de la biologie médicale.

Ils ont également dénoncé, dans cette branche, un durcissement du management et la dégradation des conditions de travail. Cela se traduit par des sous-effectifs, une forte augmentation de l'absentéisme et un turn-over énorme, notamment chez les infirmières et les techniciens, comme en a témoigné Karine Le François.

Cuir et habillement : FO refuse une harmonisation conventionnelle par le bas

Le congrès a par ailleurs constaté et condamné une politique patronale visant à faire taire la voix de FO dans les entreprises du secteur. Nous, délégués FO, sommes pointés du doigt parce que nous arrivons à mettre des choses en avant. C'est très difficile pour nous actuellement, a témoigné Malika Pissembon, de chez Biogroup. On reproche même à une camarade ses absences pour tenir ses mandats. C'est l'acceptation même du fait syndical qui est rejetée dans certaines entreprises et c'est inadmissible. On sera là, a prévenu Sylvia Veitl.

Dans la branche cuir et habillement, rattachée à la fédération de la pharmacie depuis 2011, le dialogue social est également difficile. A l'instar de la branche des pharmacies d'officine, elle regroupe une multitude de petites entreprises. Les délégués restent attentifs aux conséquences du rapprochement de certaines branches de la filière et refusent que l'harmonisation des différentes conventions collectives se fasse au détriment des salariés, avec un nivellement par le bas. Ils déplorent également la volonté de renvoyer les négociations au niveau des entreprises et réaffirment la nécessité d'accords de branche, normatifs et protecteurs. Ils revendiquent notamment des négociations salariales ambitieuses et régulières et l'ouverture d'une négociation sur l'emploi des salariés expérimentés.

Répartition pharmaceutique : une course en avant schizophrénique

La répartition pharmaceutique, qui regroupe les grossistes achetant les médicaments aux laboratoires pour les revendre aux officines, est aujourd'hui le parent pauvre de toute la chaîne du médicament, a alerté Philippe Pannier, secrétaire de la branche. Sur 100 euros d'un produit pharmaceutique, on touche 2 euros. Ça fait des années qu'on est dans le rouge, a-t-il expliqué. Malgré cela, les employeurs utilisent tout ou partie de l'augmentation de la marge réglementée obtenue auprès du gouvernement pour accorder aux officines des remises irrationnelles au regard de leurs moyens, dans une course en avant schizophrénique. FO estime au contraire que cette marge devrait être mise au service de l'emploi et de l'amélioration des conditions de travail dans la branche.

Car du fait de la baisse de leurs ressources, les employeurs ont commencé à réduire le nombre d'établissements, puis à réduire le service, passant de trois à deux, voire à une tournée par jour comme chez OCP, qui possède 30% de parts de marché. Cette nouvelle organisation, qui risque d'aboutir à de nouvelles fermetures d'établissements et à des baisses d'effectifs, a aussi des conséquences sur l'organisation du travail. Des salariés de jour devront passer de nuit, d'autres en soirée.

Les délégués ont aussi condamné une organisation qui se met en place dans les établissements sur le modèle de la grande distribution, avec des contrats d'une durée hebdomadaire comprise entre 24 et 30 heures, ne laissant plus aux salariés que le choix du travail six jours par semaine ou d'accepter la polyvalence pour bénéficier d'un temps plein. Du fait des rachats et des regroupements, il ne reste plus aujourd'hui que trois acteurs majeurs dans la répartition : Phoenix/OCP, CERP Rouen/CERPS Rhin Rhône Méditerranée, et Alliance. Pour faire entendre leurs revendications, les délégués se sont donnés comme objectif de faire de FO la première organisation syndicale de la branche.

De 50 000 à 19 000 salariés chez Sanofi

L'industrie pharmaceutique est de son côté confrontée depuis plusieurs années à des cessions, des restructurations, et à une délocalisation de la production vers l'Asie. Adel Qalai, délégué central chez Sanofi, en a donné une illustration. Les effectifs du groupe sont passés de 50 000 salariés à son entrée dans l'entreprise à 19 000 aujourd'hui. Et l'objectif de la direction est de descendre sous les 10 000 personnes en 2031. On est en train de démanteler le groupe et de vendre ça à des Américains et des Allemands. Aujourd'hui, c'est même la politique du médicament qui est en danger, a-t-il alerté.

Mais les militants FO sont combatifs. Ainsi en Indre-et-Loire, la société Recipharm avait annoncé en novembre 2023 la fermeture du site de Monts. Mais avec la détermination des salariés du site et des cinquante adhérents FO, seul syndicat implanté sur le site, on a réussi à le préserver et à le faire reprendre il y a un an par le groupe Astrea Pharma, dans le cadre de la loi Florange, s'est félicité Grégoire Hamelin. Cette cession s'accompagne de 25 millions d'euros pour faire face aux dettes et relancer l'activité. On a aussi obtenu le maintien de tous les accords et de tous les emplois pour une durée minimale de 3 ans, et une prime de transfert de plus de 6 000 euros pour l'ensemble du personnel, a ajouté le secrétaire de l'UD, saluant l'appui de la fédération dans ce combat.

Chez Dopharma, en Loire-Atlantique, les salariés, soutenus par FO, ont refusé de subir passivement les décisions patronales, à l'occasion du deuxième rachat du site en deux ans.

Des gens qui n'avaient jamais fait grève en 30 ou 40 ans de carrière ont cessé le travail pour la première fois, et l'usine s'est arrêtée un jour et demi. On a dit au groupe Boehringer que s'il voulait qu'on continue à travailler et nous vendre à un bon prix, il faudrait payer. Chaque salarié a reçu 15 000 euros. C'est une victoire qui a fait date. Elle a montré que si tous les salariés s'y mettent, on peut gagner, s'est félicité Baptiste Cassard, secrétaire de la section FO.

Le site Sanofi de Maisons Alfort va être quant à lui cédé en mars 2026 à un façonnier allemand. Les salariés sont en grève depuis juillet. FO a été le moteur de la grève, pour aller obtenir des mesures d'accompagnement a ajouté Adel Qalai. Et grâce à FO, dans le cadre d'un accord de transition, un salarié moyen va obtenir une prime de cession de 60 000 euros ainsi qu'une prime de performance de 10 000 euros.

Sensibiliser au handicap

Selon le congrès, qui condamne cette situation, trop d'entreprises de la branche abusent du Crédit impôt recherche. En 2023, selon le rapport du Sénat paru en juillet dernier, les aides publiques accordées aux entreprises, ont représenté au total 211 milliards d'euros de manque à gagner pour les comptes publics. Des aides accordées sans contreparties.

Cette conditionnalité des aides publiques aux entreprises fait partie des revendications portées par FO. Et la première condition, c'est l'emploi, a rappelé Frédéric Souillot, le secrétaire général de FO qui a présidé l'ensemble du congrès.

On doit porter encore plus loin la conditionnalité des aides aux entreprises. Parce que demain il faut qu'on reparle de souveraineté industrielle, qui contribue à la souveraineté économique du pays. C'est avec l'industrie qu'on contribue à la cohésion sociale des territoires. Chaque fois qu'on perd un emploi industriel, on perd quatre emplois induits. La réindustrialisation et la défense de l'industrie, quelle que soit la branche, doit être notre priorité, a-t-il lancé.

Frédéric Souillot a aussi insisté sur le nécessaire développement de FO pour peser pour nos revendications et les faire aboutir et pour faire cesser les discriminations, a-t-il encouragé.

En matière de lutte contre les discriminations, l'humoriste Christophe Fluder a donné une conférence-spectacle décapante d'une heure et demie sur les thèmes du handicap et de l'inclusion, un moyen d'appréhender un sujet sérieux sans se prendre au sérieux, mais une manière d'éveiller nos consciences, a souligné Sylvia Veitl.

Le handicap, visible et non visible, sera d'ailleurs évoqué sur le verso de la carte de vœux de la confédération pour 2026, a dévoilé en avant-première Frédéric Souillot, qui voit dans ce sujet une vraie priorité pour notre organisation syndicale.

On ne se résigne pas, on va continuer à se battre tous ensemble avec les jeunes et les moins jeunes et revendiquer pour obtenir toujours plus et défendre nos droits. Pour être plus forts, soyons partout et plus nombreux, a lancé Sylvia Veitl.