Stellantis dans un creux de production

Rédigé le 21/10/2025
par Thierry Bouvines, L'inFO militante

Les sites Stellantis de Poissy, Sochaux et Mulhouse stoppent leur production pendant plusieurs jours à partir de cette mi-octobre. En partie faute de commandes, mais surtout pour des raisons logistiques. État de la situation sur les trois sites avec les délégués FO.

Pour environ 2 000 ouvriers, techniciens, et employés du site Stellantis de Poissy le travail est à l'arrêt depuis le 13 octobre et jusqu'au 2 novembre. Deux de ces trois semaines d'arrêt de la production étaient prévues.

A Poissy, des raisons logistiques

Elles s'expliquent par le vidage des stocks avant la déclaration fiscale de fin octobre et par le déménagement des packs batterie dans un autre bâtiment, indique Brahim Ait Athmane, délégué syndical (DS) FO du site. Quant à la troisième semaine, la direction invoque des méventes, mais les immatriculations de l'[Opel] Mokka progressent en Grande-Bretagne et en Allemagne, nos principaux marchés, signale Brahim Ait Athmane.

Surtout, le délégué FO – le syndicat est majoritaire sur le site – dément les messages alarmistes sur l'avenir de l'usine émanent d'un autre syndicat. La direction n'a jamais dit qu'elle arrêterait la production de la Mokka, aucune annonce n'a été faite en comité social et économique, tient-il à préciser. En mai dernier, la direction déclarait que l'usine a un projet industriel établi jusqu'en 2028 (dont l'assemblage de l'Opel Mokka et de la DS3). L'arrêt de la production à cette période de l'année pour vider les stocks étant inscrit dans la mémoire collective des salariés, ces derniers ne sont pas inquiets, assure Brahim Ait Athmane.

A Sochaux, craintes sur la pérennité de l'équipe de nuit

Le site de Sochaux, qui emploie 6 500 salariés à la fabrication des Peugeot 3008 et 5008, est quant à lui dans une situation paradoxale : il fait le plein de commandes qu'il ne peut pas toutes honorer, mais stoppe la production quatre jours en octobre. La difficulté est industrielle avant que d'être commerciale. Le site produit en effet des 3008 et des 5008 dans des versions classiques et plus sophistiquées (dual motor), mais sur une seule ligne de montage. D'un côté, sur les versions dual motor, nous avons des commandes que nous ne pouvons pas honorer faute de pouvoir augmenter la production, nos fournisseurs donnant déjà le maximum, explique Thierry Giroux, DS FO de Stellantis Sochaux. De l'autre, nous connaissons une baisse de volume sur les 3008 et 5008 classiques, mais donc sans possibilité d'augmenter la production des modèles les plus demandés. D'où quatre jours d'arrêt pour 2 500 salariés. Leur crainte porte sur la pérennité de l'équipe de nuit. La direction dit qu'il y a suffisamment de volume pour maintenir l'équipe de nuit en 2025, mais les salariés ont des craintes pour 2026; FO demande des réponses claires, déclare Thierry Giroux.

A Mulhouse, baisse de la demande

C'est à Mulhouse, qui fabrique notamment des 308, des 408 et des DS7, que la baisse de la demande a les répercussions les plus directes sur la production. Fin septembre, la direction a annoncé un arrêt de cinq jours entre le 27 et le 31 octobre, rapporte Déborah Schorr, DS FO de ce site employant 4 700 salariés. Ce n'était pas prévu, précise-t-elle. La militante signale également un arrêt de production le 10 octobre, mais cette fois en raison d'un problème de fournisseur. Pour Déborah Schorr, le secteur automobile français traverse une crise qui rappelle celles des mines et de l'industrie textile. En cause, la décision européenne de passer au 100% électrique en 2035, mais des consommateurs qui n'achètent pas de véhicules électriques. Les salariés craignent que la situation ne perdure, ils attendent beaucoup des annonces des décideurs politiques européens et français, déclare la déléguée FO.

Activation de l'APLD-Rebond

Lorsqu'ils sont contraints d'arrêter le travail, les salariés de Stellantis doivent consommer les récupérations de leurs heures supplémentaires; ils perçoivent dans ce cas 100% de leur rémunération. Lorsque leur compteur est vide, ils basculent en activité partielle longue durée rebond (APLD-Rebond). Ce dispositif, objet d'accords signés par les syndicats (dont FO), garantit aux salariés une rémunération correspondant à 70% de leur salaire brut (84% du salaire net horaire), ou 100% s'ils suivent une formation. L'État verse à l'employeur une allocation allant jusqu'à 60% de la rémunération brute horaire. En contrepartie, l'employeur s'engage à ne pas supprimer d'emplois pendant la durée du dispositif.

D'autres sites de Stellantis sont également concernés par des arrêts de production, en Allemagne, Espagne, Pologne et Italie, mais aussi des sites du constructeur Volkswagen ainsi que des équipementiers. Signes évident de la fragilité du secteur industriel automobile pris dans la tourmente de la concurrence chinoise, des difficultés de ventes des véhicules électriques et de la bataille douanière lancée des États-Unis par le président Trump.