Morts au travail, une réalité

Rédigé le 25/11/2025
par Eric Gautron, Secteur de la Protection sociale collective

La Branche Accidents du Travail – Maladies Professionnelles vient de rendre public son rapport 2024. Les données publiées dressent un constat alarmant : le travail continue de tuer et de blesser massivement.

En 2024, 926 358 sinistres d'origine professionnelle ont été reconnus sur plus d'un million déclarés, parmi lesquels :

  • 716 475 accidents du travail, dont 764 mortels;
  • 79 549 maladies professionnelles, dont 215 mortelles;
  • 130 334 accidents de trajet, dont 318 mortels.

Au total, 1 297 décès liés au travail ont été recensés, soit 10 de plus qu'en 2023. Cela signifie que le terrible chiffre de 25 morts par semaine n'a pas évolué à la baisse.

La dynamique est tout aussi préoccupante du côté des arrêts de travail : près de 79 millions de jours d'arrêt ont été indemnisés au titre de ces différents sinistres. Les dépenses de la Branche atteignent ainsi 10,533 milliards d'euros, englobant soins, indemnités journalières et indemnisations des séquelles.

Ces chiffres, déjà dramatiques, ne donnent pourtant qu'une image très partielle de la réalité. La sous-déclaration des accidents du travail et la sous-reconnaissance des maladies professionnelles restent majeures, et de nombreux sinistres échappent encore à la Sécurité sociale. Ces pratiques permettent de réduire artificiellement le coût pour les employeurs et de masquer l'ampleur réelle des risques professionnels. Cette invisibilisation statistique affaiblit la prévention et prive les travailleurs de leurs droits.

Image très partielle de la réalité aussi parce que ces chiffres ne tiennent pas compte ni de la fonction publique ni du monde agricole.

Rappelons enfin que derrière ces données se trouvent des vies bouleversées : des femmes et des hommes durablement atteints dans leur santé, des familles endeuillées, des projets anéantis, des parcours professionnels brisés.

Les victimes doivent trop souvent affronter un chemin administratif long et éprouvant, auquel s'ajoute une indemnisation insuffisante qui accentue encore leur fragilité économique et sociale. Chaque sinistre est une histoire humaine qui ne saurait être réduite à une ligne de tableau.

Ces éléments soulignent l'urgence de renforcer la prévention, de garantir une transparence statistique réelle, d'améliorer la reconnaissance des sinistres et d'assurer aux victimes un accès rapide, simple et équitable à leurs droits.